Blaye, Ousmane et Babacar ont tous les trois quitté le Sénégal pour l'Espagne. Non éligibles à l'asile, ils partagent la même ambition : postuler aux titres de séjours dits "arraigos", réservés aux migrants en situation irrégulière. Malgré les différentes réformes engagées par le gouvernement espagnol pour faciliter leur obtention, l'accès à ces titres reste long et difficile pour les exilés, bien souvent enfermés dans une grande précarité. Reportage.
D’un geste précis, Blaye aligne les sacs à main en similicuir sur une petite bâche grise posée à même le sol. À deux potentielles clientes polonaises qui semblent intéressées par un sac à dos rose, le Sénégalais de 35 ans déroule son argumentaire, dans un espagnol impeccable. Depuis son arrivée en Espagne il y a deux ans, Blaye répète inlassablement les mêmes mots, et a appris à fuir les patrouilles de la police. La vente de sacs contrefaits dans le centre-ville de Madrid est son quotidien.
Ces dernières années, des dizaines de milliers de migrants comme lui sont entrés en Europe par l’Espagne. En 2024, plus de 63 000 arrivées ont été comptabilisées par le ministère de l'Intérieur, un record. Si une partie des exilés ne fait que transiter dans le pays pour rejoindre la France, la Belgique ou l’Allemagne, nombreux sont ceux qui choisissent de rester. Se pose alors la question de leur régularisation. Pour les migrants qui ne demandent pas l'asile, une solution existe : le permis de séjour de type "arraigos", "racines" en français.
"À ce jour, il en existe quatre : de travail, social, de formation, et familial, liste Ana Alañon, avocate en droit des étrangers à la fondation Humanisme et Démocratie, à Madrid. Ces titres sont réservés aux personnes en situation irrégulière, qui peuvent notamment justifier, selon les permis, de deux à trois ans de présence sur le territoire espagnol".

Blaye a appris à repérer les patrouilles de la police espagnole, à Madrid. Crédit : InfoMigrants
Depuis deux ans, pour soutenir l'économie du pays, le gouvernement espagnol concentre justement ses efforts sur les "arraigos", et a impulsé diverses réformes afin d’en faciliter l’accès. "L’arraigo para la formación" a par exemple été lancé en août 2022 : il permet aux personnes sans papiers de suivre une formation dans les secteurs qui manquent de main-d’œuvre, et donc de trouver un emploi plus facilement à l’issue de celle-ci.
Entre l’été 2022 et fin 2023, plus de 23 000 "arraigos" de formation ont ainsi été accordés à des migrants, ayant passé en moyenne deux ans et demi en situation irrégulière. Soit une période nettement plus courte que pour d’autres exilés sans papiers, qui attendent généralement plus de quatre ans avant d'obtenir un titre de séjour.
Globalement, au regard des chiffres publiés par le ministère de l'Inclusion, de la Sécurité sociale et des Migrations, les "arraigos" parviennent à toucher leurs cibles : au 31 décembre 2023, 210 334 personnes disposaient d’un titre de séjour de ce type, soit 85 000 de plus qu’en 2022. Ce titre de séjour, valable un an, peut déboucher ensuite sur un "permis de résidence" ou "une autorisation de séjour et travail".
"Cette attente, c'est difficile"
Mais sur le terrain, le bilan est plus mitigé. "L’arraigo de formation" par exemple n'a pas forcément tenu toutes ses promesses : sur ses 23 000 bénéficiaires, seuls 1 347 ont obtenu, à l’issue de la formation, un contrat de travail. Rosa, originaire de Colombie, a eu "un problème administratif" et n'a finalement "pas été autorisée à travailler", bien qu'ayant obtenu son diplôme d'aide à domicile. "Ce n’est pas facile de s’y retrouver", souffle la jeune femme, rencontrée par InfoMigrants dans un cours de droit pour les étrangers, organisé par la ville de Madrid.
1/La ville de ????????Madrid propose chaque semaine des cours appelés « conoces tus leyes », « connais tes lois », aux migrants. Ils se déroulent en classe d’une vingtaine d’élèves, toutes les semaines, dans un des CEPI (Centre de participation et d’intégration) de la ville. pic.twitter.com/sBzSjYyO8S
— Marlène Panara (@m_panara) March 20, 2025
Surtout, le temps exigé en situation irrégulière pour postuler à ces titres - de deux à trois ans - contraint les migrants à une longue attente, très souvent dans une grande précarité. En vendant ses sacs à la sauvette, ne pouvant "rien faire d'autre", Blaye "gagne juste de quoi manger" et "payer [son] logement", un petit appartement qu’il partage avec plusieurs amis.
Ousmane*, originaire de la région de Casamance au Sénégal, souhaite lui aussi "postuler à l’arraigo". Débouté du droit d’asile après huit mois sur le territoire espagnol, il lui reste encore près de deux ans avant de pouvoir prétendre à ce titre de séjour. "Cette attente, c'est difficile, car je n'ai plus rien" - Ousmane a été hébergé dans un centre pour demandeurs d'asile qu'il a dû quitter après avoir reçu son refus. Pour un temps, le jeune homme a travaillé comme menuisier, mais n'avait d'autre choix que de dormir dehors. "J’ai tenu trois mois comme ça. La rue m'a épuisé, alors j'ai fini par quitter mon travail".

Débouté du droit d'asile, Ousmane n'a plus que "l'arraigo" que pour sortir de l'irrégularité. Crédit : InfoMigrants
Il y a quelques mois, Ousmane a trouvé un toit dans un centre de la Croix-Rouge, où il a depuis suivi une formation. "Maintenant, j’ai un diplôme dans la gestion de stocks. Mais c'est impossible de travailler sans papiers, personne ne me veut. Alors je patiente, confie-t-il en replaçant l’une de ses courtes dreadlocks derrière son oreille. La journée, je traîne un peu dans la ville, je parle à mes amis. C'est dur. Il y a des jours où je regrette d'être venu ici".
"Une vision utilitariste de la migration"
"Les arraigos et les différentes réformes lancées par le gouvernement, c’est une bonne chose, cela permet à beaucoup de personnes de s’en sortir. Mais cette approche traduit en même temps une vision utilitariste de la migration, liée uniquement aux besoins économiques du pays. La conséquence, c'est que de nombreux migrants plongent alors dans la pauvreté et ne peuvent en sortir", explique Élisa Brey, professeur de sociologie à l’Université Complutense de Madrid. "De plus, les exilés ici n’ont pas les réseaux d’entraide traditionnels qui profitent aux citoyens espagnols, comme la famille. En Espagne, quand les gens ont un problème, ils ne comptent pas vraiment sur l’État, ils vont voir leurs parents".
"Ici, je n’ai personne pour m’aider", confirme Ousmane. Babacar*, qui a quitté le Sénégal fin septembre 2023, ne compte lui aussi que sur lui-même, et sur le réseau associatif de la capitale. Passé par Tenerife aux Canaries puis par Barcelone, Il a connu la rue à Madrid. "J’y ai vécu trois mois : deux sur la Plaza Eliptica, un dans le quartier de Lavapiès, tient-il à préciser. C’était vraiment une période très difficile : je n’avais rien et mon père est mort à ce moment-là".
Désormais hébergé dans un appartement avec d’autres migrants par une association catholique, Babacar "fait tout pour être prêt le jour où [il] pourr[a] demander l’arraigo". Le jeune Sénégalais a obtenu une formation de peintre en bâtiment, une autre en électricité, ainsi qu’une troisième en cuisine. Et chaque "lundi, mercredi, et vendredi", il assiste à des cours d’espagnol. La pile de feuilles polycopiées qui trône sur son petit bureau atteste de son assiduité. Les leçons et exercices sont soigneusement rangés dans une pochette en carton, à côté d'un pot de Nutella. Une gravure sur bois représentant un jeune garçon et une femme plus âgée les surplombe. "C'est ma mère et moi, quand j'étais petit".
"Le 22 octobre 2025, cela fera deux ans que je suis en Espagne. Je pourrai alors postuler à l’arraigo de travail, si je trouve un employeur qui veut bien me faire un contrat et m’embaucher", espère-t-il. Dans le centre-ville de Madrid, Blaye partage la même ambition, mais n’a jusqu’ici pas réussi à convaincre une entreprise. "Ce n’est pas simple, mais ça va aller", sourit-il.
Ousmane, lui, prévoit de demander "l’arraigo de segunda opportunidad", "de la seconde chance". Ce titre de séjour sera mis en place à partir du 20 mai prochain, en même temps qu’une nouvelle réforme de la règlementation liée aux étrangers, et permettra notamment aux demandeurs d’asile déboutés d’obtenir un titre de séjour, à condition qu’ils justifient d’un certain nombre d’heures de travail. "Aujourd'hui, je n'ai plus le choix. L’arraigo, c’est ma seule chance d’avoir un jour des papiers".
*Les prénoms ont été modifiés à la demande des intéressés.
Allison
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Jennifer
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