Où en est-on de la 8e vague de Covid ? Comment va-t-elle évoluer ? Qu’en est-il de l’émergence de nouveaux variants ? Ce sont les premières questions que le gouvernement a posées au Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires. Son nom : le Covars. Installée depuis un mois, l’instance remplace le conseil scientifique, spécial Covid, présidé par le professeur Jean-François Delfraissy. Il ne s’agit plus seulement de gérer une crise mais d’anticiper les prochaines.
Ses dix-neuf membres - infectiologue, virologue, vétérinaire, urgentiste - avec à leur tête, l’immunologiste Brigitte Autran, livrent leur ligne directrice dans un premier avis. L’enjeu est de taille ; réduire l’impact du Covid et des infections hivernales tout en protégeant un système de santé fragile. Leur mot d’ordre tient en quatre verbes : « Prévenir, dépister, traiter et impliquer ». Explications.
À quoi est due la reprise actuelle ?
Après la rentrée des classes, la courbe, portée par le sous-variant BA.5, s’est, à nouveau, emballée, entraînant une 8e vague, et un nombre de cas de 576 pour 100 000 habitants. Selon les membres du Covars, ce redémarrage ne semble pas être dû à l’apparition d’un nouveau variant. Mais il est très « vraisemblablement » lié à une conjonction de plusieurs facteurs : baisse de l’immunité collective, conditions climatiques favorables à la diffusion du virus, reprise de l’école.
Cette 8e vague est-elle jugée inquiétante ?
Si l’impact chez les plus de 65 ans reste à « surveiller », les spécialistes jugent que cette vague épidémique est d’une intensité « modérée ». Le risque de complications ou de décès est similaire à celui observé avec les sous-variants BA.1 et BA.2, à l’origine des 5e et 6e vagues, respectivement à partir de décembre 2021 et de mars 2022. Bonne nouvelle, l’impact sur l’hôpital a été inférieur à ces flambées précédentes car il y a eu, au total, moins de contaminations et donc moins de morts.
Le pic, c’est pour quand ?
Il semble être atteint. Le nombre de cas diminue mais il faut encore s’attendre, avec un décalage de deux à trois semaines, à une augmentation des hospitalisations. Les membres du Covars parlent d’un « signal précoce de ralentissement dans la dynamique de la vague en cours ». Les vacances scolaires, qui viennent de commencer et qui dispersent la population, ainsi que le redoux actuel, propice à des activités en plein air, devraient « confirmer » cette décélération. Mais ne crions pas victoire trop vite. D’abord, les températures vont logiquement repartir à la baisse. Et le sous-variant BA.5, majoritaire en France depuis fin juin, pourrait être remplacé par le dernier né : BQ.1.1.
Faut-il s’attendre bientôt à une 9e vague ?
Selon les dix-neuf membres, ces « signaux encourageants doivent être tempérés » par la croissance rapide du variant BQ.1.1 en France, détecté à la mi-septembre et responsable de 15 % des cas positifs, début octobre. Ils notent que le niveau d’échappement immunitaire de ce sous-lignage est « incertain ». Ce nouvel ennemi risque de provoquer un très grand nombre de contaminations, y compris chez les vaccinés ou déjà infectés.
Dans leur avis, les experts expliquent : « Si cette tendance devait se confirmer, elle pourrait remettre en question la dynamique apparemment amorcée de plateau-décroissance de la vague. » Depuis le début de l’année, on fait face à une cascade de sous-variants d’Omicron, au point que cela ressemble à une « soupe d’alphabet », comme l’a noté la docteure Maria van Kerkhove lors de la dernière conférence de presse de l’Organisation mondiale de la santé. Et dès que l’un devient majoritaire, patatras… une nouvelle vague commence. Gare aussi à une hausse du taux d’absentéisme, cet hiver, à l’hôpital, conséquence d’une « lassitude » voire d’une « fatigue générale » qui touche les soignants. Habituellement autour de 7 à 10 % pour le personnel soignant paramédical, il a atteint des pics de 11 à 16 % l’hiver dernier. La partie n’est donc pas encore remportée.
Quels sont les scénarios envisagés ?
Si un nouveau variant ne voit pas le jour, les modèles n’anticipent pas de « rebond majeur des hospitalisations ». Pourtant, il y en a bien un qui joue les troubles fêtes : BQ.1.1. Sur ce variant précisément, il faut attendre de mieux le connaître pour anticiper les conséquences de sa circulation. Mais voilà, les toutes premières données montrent un « important échappement immunitaire », même chez les personnes déjà contaminées par BA.2 et BA.5.
Les membres du Covars expliquent aussi qu’il faut prendre en considération l’ensemble des maladies infectieuses hivernales qui font leur grand retour : grippe, bronchiolites, gastro-entérites… « Ces épidémies accroissent fortement la tension des services spécialisés », peut-on lire dans l’avis.
Et maintenant, on fait quoi ?
D’abord, prévenir, c’est-à-dire, amplifier « rapidement » la nouvelle campagne, impulsée par l’arrivée des vaccins bivalents, adaptés à Omicron pour cibler les 18 millions de personnes éligibles dans les trois mois : plus de 80 ans, femmes enceintes, immunodéprimés… Cet été, la précédente campagne n’a été qu’un « demi-succès », précisent les experts. Ces nouveaux vaccins bivalents ne sont disponibles que depuis le 26 septembre et le 3 octobre. Le premier de Moderna cible à la fois la souche originelle du virus, dite de Wuhan et BA.1, le petit frère d’Omicron. Le second de Pfizer combat BA.5. Objectif : « amplifier fortement l’information à la population très demandeuse sur les vaccins bivalents et leurs disponibilités (qui et quand se faire vacciner ?), ouvrir des centres dans les mairies, par exemple. »
On continue de porter le masque ?
Oui ! D’ailleurs, notent les experts, « la communication doit être renforcée, incitative, simple, claire et répétée ». Il faut coupler cette mesure aux gestes barrière (distanciation physique…) car il est peu probable qu’elle suffise à éteindre l’épidémie. Le Covars demande le maintien de l’obligation du port du masque dans les structures de soin, comme à l’hôpital. Il recommande aussi de ventiler les locaux, partout où la situation l’exige, en particulier dans les établissements scolaires, ce que de nombreux épidémiologistes demandent depuis près de deux ans. Le contrôle de la qualité de l’air doit devenir, selon l’avis, « un pilier de la promotion de la santé et de la lutte contre les maladies respiratoires, en particulier dans les écoles ».
L’isolement des cas positifs, c’est terminé ?
Non. Le Covars ne remet pas en question l’isolement des personnes contaminées. Et concernant les traitements, il recommande d’accélérer l’usage du Paxlovid, cette pilule peu utilisée en France et qui permet, pourtant, de limiter les formes graves chez les plus fragiles. Le gouvernement en avait commandé 500 000 doses fin janvier 2022. Bonne nouvelle, il reste efficace contre les variants actuels.
Face à ce contexte incertain : nouvel ennemi inquiétant, hôpital fragilisé, retour des maladies hivernales… Les experts du Covars concluent que la situation « ne permet pas d’envisager à court terme l’intégration du Covid dans une gestion banalisée des risques sanitaires liés aux infections saisonnières ». Autrement dit, on ne peut pas considérer le Covid comme une simple bronchite.
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