Les masseuses indexent des hommes de tenue,gros bonnets et menacent de déballer...

VIOL, RACKET, HYPOCRISIE : Les masseuses indexent des hommes de tenue et de gros bonnets et menacent de déballer

Les histoires d’arrestation de masseuses clandestines par des hommes de tenue qu’elles accusent d’avoir abusé d’elles avant de les déférer ont défrayé la chronique il y a quelque temps. Regroupées en une association, les masseuses ont pour la première fois pris la parole. Entre «des hommes de tenue qui nous violent et nous extorquent des fonds» et «des gros bonnets et des marabouts hypocrites», les professionnelles du massage ont crié leur ras-le-bol. Leur présidente «Dieynaba» a accepté de parler à «Les Échos».

Il était 13 heures, samedi, quand nous mettions les pieds dans l’univers pudique d’un salon de massage situé dans un quartier huppé de Dakar. Quand elle nous ouvre la porte, le visage de Dieynaba, la gérante des lieux, habillée d’un body noir sur une minijupe, incarnait à la fois l’assurance et la fermeté. «Suivez-moi», nous lance-t-elle. Et avant même que nous ayons le temps de compter le nombre de chambres de cet appartement qui, de toute évidence, en compte plusieurs, la maitresse des lieux était déjà dans la pièce du local destinée à accueillir les clients de ce cabinet de massage.

Victimes de viol souvent…

Après une brève présentation des lieux comme de leur travail, la jeune femme de 25 ans, telle une tigresse affamée, saute sur les hommes de tenue qu’elle accuse d’escroquerie, mais aussi et surtout de viol. «Des hommes de tenue ont fait une descente dans le premier institut que j’avais ouvert, disant qu’ils ont reçu des informations selon lesquelles je me prostituais clandestinement. Quand ils sont venus, l’un d’eux, qui était le seul à avoir accédé au salon, m’a forcée à le masser. Et comme si cela ne suffisait pas, il m’a par la suite forcée à coucher avec lui. Mais ce qui m’a le plus fait mal, c’est que ses collègues sont venus dans la maison, quelque temps après. Ils ont essayé de m’embarquer, disant que je me prostituais, alors que c’est leur collègue qui m’a violée parce que je ne voulais pas coucher avec lui. C’est ainsi que je leur ai dit que leur collègue m’avait violée, je leur ai même montré le préservatif qu’il avait utilisé. Mais ils n’ont rien voulu entendre», s’indigne la dame.
Selon elle, beaucoup de masseuses vivent ou ont vécu le même calvaire: «Je peux par exemple vous citer le cas du salon ‘’Sirènes Massage’’. Dans ce salon, il y a quelque temps, des hommes de tenue sont venus demander à la propriétaire de leur verser de l’argent et que si elle ne le faisait pas, ils allaient tout simplement l’embarquer. Elle a refusé d’obtempérer et ils l’ont embarquée», a-t-elle illustré, dans cette pièce avec salle de bain où trônait un lit de massage avec des produits cosmétiques et des huiles de massage.

Ces masseuses qui font le «Body-Body», le «Massage+» ou «l’intégral», sans autorisation…

Très remontée contre ces hommes de tenue dont le comportement n’honore pas la corporation, Zeyna fonce et balance : «Il y a des cabinets de massage qui sont là, dans ce pays, qui font du ‘’Body-Body’’, c’est-à-dire que la masseuse et le client se mettent à poil le temps que dure le massage. Il y en a qui font du ‘’Massage+’’, c’est-à-dire que la fille fait le massage et après elle couche avec le client. D’autres font «l’intégral», c’est-à-dire masser la personne jusqu’à ce qu’elle éjacule. Pourtant ces cabines, qui n’ont pas d’autorisation et dont les employées n’ont pas de carnet de santé, ne sont nullement inquiétées parce qu’elles ont pu corrompre les hommes de tenue qui sont devenus du coup leur protecteurs. C’est ça la réalité, qu’on le veuille ou non», peste-elle.

Ce que certaines masseuses font pour ne pas être inquiétées

Zeyna de révéler que «la méthode que beaucoup de cabines ont adoptée, c’est de prendre les devants. C’est-à-dire elles invitent périodiquement les hommes de tenue pour leur remettre des sommes d’argent assez importantes qui peuvent aller jusqu’à 500.000 F Cfa et plus. Ainsi, quand il y a des descentes, la propriétaire de la cabine n’est pas inquiétée. Je vous assure que pour une masseuse envoyée en prison pour ‘’prostitution’’, au moins dix hommes de tenue doivent suivre pour ‘’viol et extorsion de fonds’’. Le massage est mille fois plus difficile que la prostitution. Nous ne sommes pas des prostituées», se dédouane la bonne dame, qui reconnaît toutefois : «parfois, pour faire plaisir à un ami ou à un client qui nous est fidèle, on peut l’aider à satisfaire ses besoins».

Ces marabouts et personnes très connues qui occupent les télés et pourtant…

Pour elle, la société sénégalaise est hypocrite. À ce propos, elle cite «ces gros bonnets» qui se mettent sur les plateaux de télévision pour s’attaquer et diaboliser les masseuses et qui, pourtant, sont des clients bien connus pas les cabinets de massages. «Il y a des marabouts et des personnes très connues dans ce pays qui viennent souvent se faire masser et, souvent, prendre du plaisir avec nous, pourtant, on ne le dit jamais. Et même ceux qui nous pourchassent se massent et ils ont même, pour certains, des copines masseuses. Ils sont tout simplement hypocrites. Il y a d’autres choses plus importantes que de passer leur temps à traquer des jeunes filles qui ne sont pas forcément des putes, comme on veut le faire croire. Mais si cet acharnement sur les masseuses continuent, je les avertis que nous avons plusieurs vidéos en notre possession et nous allons simplement tout sortir», a-t-elle menacé.

Le massage «à la Sénégalaise» avec petits pagnes et bine-bine tant prisé par les étrangers…

Tout le contraire des étrangers qui, dit-elle, sollicitent aussi leurs services : «Très souvent, nous recevons des étrangers qui nous demandent de leur faire la ‘’sénégalaise’’ c’est-à-dire nous mettre en tenue traditionnelle avec des petits pagnes et des ‘’bine-bine’’… Aussi, parfois, des touristes nous appellent depuis leur hôtel pour qu’on aille les masser. Mais malgré tout, pour dire vrai, on s’en sort très bien. La preuve, vous m’avez trouvée dans un luxueux appartement que j’ai loué pour 250.000 le mois et j’emploie trois jeunes filles qui reçoivent chaque mois leurs salaires».